Chaque mercredi, FrenchMania vous propose une série, un film et/ou un documentaire français à découvrir sur petit écran, en ligne ou en VOD, depuis votre canapé, pour garder le moral et la santé ! Aujourd’hui, vous êtes conviés à un épisode spécial courts métrages. Au programme, Marseille, Christophe, enterrement de vie de garçons et première pelle…
La Fugue de Jean-Bernard Marlin, sur Ciné +
Son premier long métrage, Shéhérazade, récompensé de trois César en 2019, avait bluffé public et critique, mais le talent de Jean-Bernard Marlin explosait déjà dans son court, La Fugue, que la Berlinale, en 2013, avait primé. L’intrigue se déroule à Marseille, sur un temps court, et la montre est jouée. Lakdar, éducateur dans un foyer pour mineurs délinquants, doit accompagner au tribunal sa jeune protégée, Sabrina, jugée pour une ancienne affaire de vol et violences. Il part confiant, mais la panique s’empare de Sabrina qui s’enfuit avant même que le jugement ne soit prononcé. Fait de tension et d’épreuves, le cinéma de Marlin n’est pas qu’immersif, il est sous influence des émotions et passions des personnages, souvent têtus, instables, imprévisibles. Il est fait d’à-coups, de décrochages, d’axes multiples, mais il sait aussi desserrer le poing et calmer le rythme. Ici, le garde-fou, c’est bien sûr le personnage de Lakdar, superbement interprété par Adel Bencherif, celui sans qui l’apaisement n’est pas pensable. AC
Juke Box d’Ilan Klipper, sur Arte.TV
Primé à Clermont-Ferrand et dans plusieurs festivals français, ce court métrage datant de 2014 et signé Ilan Klipper, papa du très beau Le Ciel étoilé au dessus de ma tête, met en scène Christophe dans la peau d’un chanteur qui a perdu la gloire et la tête. Tout se déroule dans l’appartement de Daniel, un bordel sans nom qui n’est pas que la somme des souvenirs du vieil homme mais aussi l’écho de sa dépression. Voir le chanteur, récemment disparu, dans ce rôle d’artiste isolé dont plus personne ne croit au génie, est particulièrement émouvant. « Je ne suis pas comédien, je suis un chineur, un clodo de luxe » disait Christophe dans une interview au Monde (2014). Il est pourtant un acteur né, remarquable dans ce court métrage sensible et grave qui fait le portrait d’un homme qui cherche son souffle et sa voix, une dernière fois. Quand celle-ci résonne, le moment est mystique. Sublime. AC
Une Fille moderne de Noé Debré sur Canal+
Scénariste prolifique qui a contribué à Dheepan de Jacques Audiard, de Problemos d’Eric Judor ou du Monde est à toi de Romain Gavras, Noé Debré, par ailleurs créateur de la série Parlement diffusée en ce moment sur le site de France Télévisions, s’était essayé à la réalisation avec un premier court, Le Septième continent, mini thriller obsessionnel qui mixait hallucinations et espionnage et qui a eu les honneurs du festival de Clermont-Ferrand en 2018. Lui aussi présenté au festival de court métrages le plus prestigieux en février dernier, son deuxième film court, Une Fille moderne, confronte deux personnages et leurs fragilités dans la station balnéaire clinquante d’Eilat en Israël : Nathan, un jeune étudiant en école talmudique qui retrouve ses potes parisiens pour un enterrement de vie de garçon et Jenny, une strip-teaseuse conviée pour un show privée. De la rencontre entre ce jeune homme qui n’a pas le droit de voir ni de toucher le corps d’une femme et cette jeune femme dont la vie va basculer avant même la fin de sa prestation et qui sont les deux seuls à parler hébreu, une relation pudique et profonde va prendre corps, et âmes. Un film puissant, d’une efficacité formelle imparable et qui brasse des thèmes forts. FFM
Quatorze ans de Barbara Carlotti sur Canal+
Il y a 15 ans, elle chantait une ritournelle drôle et irrévérencieuse sur le festival de Cannes et ce n’était pas vraiment par hasard. Barbara Carlotti flirtait depuis ses débuts dans la chanson avec le cinéma et, avec ce premier court métrage musical et enchanteur, c’est un peu comme si elle lui avait roulé une première pelle. En suivant une nuit de l’été 1988 en Corse pendant laquelle Vanina, sa grande sœur et sa cousine vont faire le mur pour faire la fête, au rythme de chansons toutes plus entêtantes les unes que les autres et jouant délicatement avec les codes du meilleur de la pop française des années 80, de la longue marche depuis la maison de vacances aux excès en tous genres de la soirée qui les attend, c’est à un véritable parcours initiatique chorégraphié, charmant et sautillant que nous convie la réalisatrice. Et, comme c’est souvent la cas avec les films qui se déguisent sous des apparences légères, Quatorze ans déploie dans sa dernière scène une beauté et une force qui prennent de court, coupent le souffle et convoquent à la fois les sens, les corps et la nature. Ça doit être ça la grâce. FFM