Chaque année le Champs Elysées Film Festival promeut le meilleur du cinéma indépendant français et américain. FrenchMania se penche chaque jour sur les films programmés pour la compétition de cette édition on line du festival qui aura lieu jusqu’au 16 juin.
Pour cette quatrième chronique, FrenchMania s’intéresse à deux documentaires américains très différents l’un de l’autre : Crestone, tourné au cœur d’une communauté néo-hippie du Colorado et Bloody Nose, Empty Pockets qui suit le dernier jour d’un bar de quartier à Las Vegas.
Crestone – Marnie Ellen Hertzler – États-Unis
La réalisatrice s’est immergé parmi quelques uns de ses meilleurs amis qui ont choisi de quitter leurs quartiers cossus de Californie pour créer un monde à part à Crestone dans la désert du Colorado. Ils sont tatoués, font du rap et fument de l’herbe en communauté, à l’écart de la société. Si ce film sous forme de work-in-progress déroute, c’est qu’il déploie volontiers une narration flottante et ne cherche jamais à créer une quelconque empathie avec les personnages qu’il met en scène. Cette communauté de millenials post-hippie semble tourner un peu en rond et leurs quêtes fantasques d’une société auto-suffisante, d’un monde nouveau, donnent lieu à des scènes un peu surréalistes dans lesquelles le spectateur n’est pas toujours le bienvenu. Restent un sens inné de l’esthétique, une réelle aptitude à représenter visuellement les méandres de l’introspection, une vraie aptitude à créer des images mentales et un dernier plan qui est sans doute l’un des plus beaux vus cette année.
Bloody Nose, Empty Pockets – Bill Ross IV et Turner Ross – États-Unis
Bienvenue au Roaring 20’s, bar de quartier du vieux Las Vegas qui vit son dernier jour, sa dernière nuit. La caméra des frères Ross a filmé les derniers moments de ce lieu bien loin du Las Vegas de carte postale qui brasse une clientèle fidèle et hétéroclite venue célébrer la fermeture de leur repaire. Unité de lieu, unité de temps, diversités de clients. Ce sont eux qui font le sel de ce documentaire en immersion : ces working class anti-hero qui sont toujours élevés par le destin dans les film de fiction hollywoodiens et qui ici restent qui ils sont, parlent sans tabou de leurs échecs, de leur bonheurs, de leurs peurs. L’alcool aidant, on s’embrasse, on danse, on chante, on se bat, on s’engueule et on s’endort. Totalement imprégné d’une ambiance seventies un peu hors du temps, Bloody Nose… c’est l’équivalent US des brèves de comptoir. Les frères Ross dessinent un portrait de groupe fascinant, drôle, émouvant et ont l’intelligence de ne jamais prendre leurs “personnages” de haut. Des jeunes, des vieux, des blancs, des noirs, des hommes, des femmes, qui tentent en vain de fuir le quotidien dans ce refuge d’alcool et de musique en sachant très bien que rien n’aura changé une fois que le jour se sera levé.