Une opérette sous le sapin
William Lebghil n’est-il pas l’acteur chouchou de cette fin d’année ? On le retrouve aux côtés de notre bande d’urgentistes préférée dans la troisième saison d’Hippocrate de Thomas Lilti (actuellement diffusée sur mycanal), dans le premier long métrage de Victor Rodenbach Le Beau rôle (toujours en salles) et, enfin, dans Joli Joli, comédie musicale seventies de Diastème, où il incarne un écrivain ruiné et sans grand talent. Lebghil inspire donc les cinéastes ces derniers temps et renouvelle avec panache la figure du héros romantique. Dans le Beau rôle et Joli Joli, deux films qui donnent littéralement envie de (re)tomber amoureux, il joue, coup sur coup, deux partitions tendres et touchantes qui rompent avec les standards. « Quand je l’ai vue si belle à l’autre bout du bar, j’ai pensé c’est Noël quelques jours en retard » chante le héros dans Joli Joli. Celle qu’il aime n’est autre qu’une actrice en vogue, interprétée par Clara Luciani qui fait ici ses délicieux premiers pas au cinéma. Né d’un désir d’opérette (à contre-courant de la filmographie du réalisateur), mis en musique par son ami de toujours Alex Beaupain (neuf collaborations avec Christophe Honoré, dont Les Chansons d’amour et Les Bien-aimés), Joli Joli fait des étincelles en cette période de fêtes et nous enveloppe de sa douceur. Sans renier les codes et les thèmes de l’opérette (découpage en actes, marivaudage et quiproquos), le réalisateur parvient à insuffler beaucoup de poésie, de modernité et de vitalité à son film. La trame narrative y est classique : une histoire d’un soir, une vie qui sépare et un « idéal », comme disait Demy, aveuglement poursuivi… Des péripéties de tous ordres qui conduiront aux retrouvailles tant espérées des deux amants et de toutes celles et ceux appelés à s’aimer. On se ballade, avec eux, dans le Paris de la fin des années 70, avant de partir pour Rome et son Cinecittà – bel hommage à cette époque marquée par les arts, picturaux, musicaux et cinématographiques (on se croirait parfois dans les décors du Magnifique de De Broca). Qui dit opérette, dit aussi personnages secondaires. La chorale est plaisante, chaque protagoniste apporte son grain de sel et donne du timbre à l’ensemble. José Garcia campe un producteur charmé par son actrice, Laura Felpin une femme de ménage/assistante qui s’est entichée de son patron (Lebghil) et Grégoire Ludig et Vincent Dedienne, un couple gay (réalisateur et acteur star) dans le placard. Joli joli vient conclure une année riche en propositions françaises de films musicaux (Emilia Pérez, Les Reines du drame) avec beaucoup de fraîcheur, osant les clins d’œil, à travers ses compositions stylisées, ses décors de studio, ses couleurs et ses élans lyriques, à Chantons sous la pluie, Une Chambre ville et Jeanne et le garçon formidable. Difficile de ne pas tomber sous le charme de Joli Joli.
Réalisé par Diastème, Écrit par Alex Beaupain et Diastème. Avec Clara Luciani, William Lebghil, José Garcia, Laura Felpin… 1h56 – Haut et court. En salles le 25 décembre 2025.