Si j’avais un marteau
Dernier film de la compétition officielle projeté au Festival, You Were Never Really Here marque le retour de Lynne Ramsay, découverte en 2011 avec le glaçant We Need To Talk About Kevin, portrait d’un adolescent psychopathe que sa maman a mal aimé. Ici, mêmes cartes mais autre manche. Joe (Joaquin Phoenix) est un mercenaire. Maltraité lorsqu’il était enfant, Joe s’occupe aujourd’hui de sauver les têtes blondes des mains des pires ordures. Son arme : un marteau, pour casser du pédophile. Cinglant et sanglant, You Were Never Really Here est un film noir, un revenge movie qui cite sans vergogne Taxi Driver, La Nuit du Chasseur, Psychose et Gone Girl (Ramsay cultive la ressemblance physique entre Ekaterina Samsonov, qui interprète Nina, et Rosamond Pike). Malgré un montage singulier qui ne craint pas les cuts et les flashbacks You Were Never Really Here trace à traits grossiers la pshychologie de Joe : enfant maltraité = adulte accidenté. Sur le corps de l’antihéros, les séquelles du passé. Des traces laissées dans la chair et dans la tête par un père violent et par la guerre – les flashbakcs de Joe nous conduisent sur tous les terrains qui l’ont traumatisé – motifs pas très originaux. Ramsay mise tout sur le découpage de son film et sur le corps de son acteur, massif. Un corps en forme de cartographie, celle du cauchemar américain. Ramsay donne un marteau à Joe, mais c’est elle qui enfonce les clous. Et nous, spectateurs, sommes prisonniers de cet enfer qui dure 1H36. Le sursaut aurait pu venir de la bande originale, signée par l’immense Jonny Greenwood, mais on a connu le compositeur plus inspiré (comme chez Paul Thomas Anderson par exemple). Désillusions.
Réalisé par Lynne Ramsay. Avec Joaquin Phoenix, Ekaterina Samsonov, Alessandro Nivola … Durée : 1H36.