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Arras Film Festival (1) : “Une part d’ombre” et “Zagros”

par | 11 Nov 2017 | CINEMA

FrenchMania est partenaire du Arras Film Festival. Franck Finance-Madureira, co-rédacteur en chef, fait partie du jury presse du Syndicat français de la critique de cinéma sous la présidence de Philippe Rouyer (Positif, Le Cercle) et notre journaliste Valentin Carré suit la compétition européenne. Premiers retours sur deux films de la compétition qui en compte neuf.

Arras : La compétition européenne (1)

par Valentin Carré

Hasard du programme, on commence par deux films belges, un wallon et un flamand, qui sont aussi deux variations sur la force de la confiance face aux tentacules du doute.

Une Part d’Ombre

David, professeur de théâtre wallon, mène une vie sans encombre, entouré de sa femme Julie et de leurs deux enfants. Après un séjour dans les montagnes brumeuses des Vosges, il est convoqué par la police suite au meurtre d’une jeune femme. Un témoin assure que David est monté à bord de sa voiture, il devient alors le suspect principal du crime. Alors qu’il tente de prouver son innocence, ses proches commencent à douter de sa version des faits. Avec ce thriller intimiste, Samuel Tilman illustre la fragilité des liens que nous tissons. Surtout, il met en évidence le pouvoir destructeur de la rumeur. Confrontés à leurs doutes sur l’honnêteté de David, ses amis et sa femme se désolidarisent rapidement de lui, préférant le fantasme à la vérité factuelle. Abandonnés par tous au moment où il aurait justement le plus besoin d’eux, David se retrouve seul face au brouillard judiciaire. Malgré son propos pertinent sur l’absurdité de la justice populaire, Une part d’ombre peine à installer une véritable tension, basculant finalement dans une morne alternance « l’a fait /l’a pas fait ». Si Fabrizio Rongione (découvert par les frères Dardenne et, mercredi prochain, à l’affiche de Diane a les épaules) maitrise son personnage, la faiblesse des rôles secondaires pèse sur la crédibilité du film. A l’image de David qui tente de justifier son innocence face à la police, Une part d’ombre manque d’assurance pour réellement convaincre.

Zagros

Dans la campagne vallonnée du Kurdistan turc, Zagros vit en compagnie de sa femme Havin, de leur fille et de son troupeau de moutons. Accusée d’infidélité, Havin est menacée par sa belle-famille, tant et si bien qu’elle décide de fuir le pays pour la Belgique. Suivant son amour et son instinct paternel, Zagros finit par rejoindre son épouse et sa fille. Cependant, influencé par son père et par les rumeurs du village, il n’arrête pas de douter de l’honnêteté d’Havin. Tiraillé entre sa confiance en elle et l’honneur de sa famille, Zagros tombe peu à peu dans la paranoïa.  Au carrefour de nombreuses thématiques, ce premier long-métrage du réalisateur d’origine kurde Sahim Omar Kalifa expose l’impossible dilemme entre le respect des traditions et le choix de la modernité. Pris en étau entre sa famille conservatrice et sa femme en quête d’émancipation, le berger ne parvient pas à trouver sa place. Alors qu’il fait le choix de quitter sa terre natale pour l’inconnu, son père, comme un fantôme du passé, revient le hanter dans les rues de Bruxelles. Bien qu’il s’étire en longueur et en tergiversations, Zagros illustre avec justesse le poids de la famille dans la société kurde et la difficulté de s’en détacher. Il en résulte un intelligent discours sur l’intégration, un processus plus délicat qu’il n’y parait.

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