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Charlotte a 17 ans de Sophie Lorain

par | 11 Juin 2019 | CINEMA

Oiseau rebelle

Copyright Les valseurs

C’est en noir et blanc que la réalisatrice québecoise Sophie Lorain fait le portrait d’une adolescente qui veut “changer le monde“. Charlotte a 17 ans, un chagrin d’amour (l’homme de sa vie est gay) et deux meilleures copines – une punk et une sainte – avec qui elle descend régulièrement des packs de bières dans un parc à jeux de quartier. Le verdict tombe : Charlotte est dépendante affective. Il faut l’en guérir. Les trois copines trouvent, avant les fêtes de Noël, un petit job dans un magasin de jouets où travaillent également des garçons aussi cool que séduisants, plus ou moins célibataires. Bingo. Avec eux, Charlotte va avoir du fun, et enchaîner les histoires sans lendemain, jusqu’à ce que les qu’en-dira-t-on la rattrapent aux quatre coins des rayons du magasin transformé en lieu de marivaudage. Un garçon qui collectionne les filles, on appelle ça un tombeur, et on lui tire son chapeau. Alors pourquoi les qualificatifs changent lorsque c’est une fille qui tombe les garçons ? Cette question que se pose Charlotte – et qui va motiver son combat pour la liberté et l’égalité des sexes – irrigue tout le film. Sophie Lorain l’aborde avec intelligence, humour et perspicacité, et renverse la vapeur de la plus jouissive des manières. Longtemps réservé aux histoires de garçons qui perdent leur virginité ou aux histoires de jeunes filles prudes et impopulaires qui découvrent l’amour pour la première fois, le teen-movie fait ici entendre une mélodie plus moderne, plus proche de la réalité adolescente, et aborde la sexualité du point de vue des filles. Il y a les orgasmes bien sûr, mais il y a aussi les discours, et ces discours sans tabous sur le sexe sont d’une fraicheur réconfortante. Féministe, le film l’est sans détours, et il n’évite aucune des paires d’yeux qui jugent l’héroïne, qu’il s’agisse de celles des hommes ou des femmes elles-mêmes, avant que Charlotte ne décolle les étiquettes comme on arracherait un sparadrap, aidée par ses copines et un plan. Charlotte a 17 ans nous régale par ses dialogues affutés, ses personnages habités et par sa volupté. Sa liberté de ton l’amène à mélanger les genres et les références, des auteurs grecs et latins à Maria Callas qui chante “L’amour est un oiseau rebelle” ou encore à la comédie romantique made in Bollywood. Marguerite Bouchard, qui interprète Charlotte, est une révélation – sans conteste une graine de star -, mais l’ensemble du casting ravit : une nouvelle génération de comédiennes et comédiens s’illustre avec brio. Le jeu est élégant, toujours juste, ultra-fluide. C’est un sans faute pour Charlotte a 17 ans, deuxième long-métrage boosté par une énergie joyeuse et une bande originale plaisante.

Réalisé par Sophie Lorain. Avec Marguerite Bouchard, Romane Denis, Rose Adam, Alex Godbout … Durée : 1H29. En salles le 12 juin 2019. CANADA.

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