Chaque mercredi, FrenchMania vous propose une série, un film et/ou un documentaire français à découvrir sur petit écran, en ligne ou en VOD, depuis votre canapé, pour garder le moral et la santé ! Aujourd’hui, espionnage international, rehab et théâtre traditionnel chinois…
Le Bureau des légendes, saison 5 sur Canal+
Fake news or not fake news ? Malotru (Mathieu Kassovitz) a-t-il vraiment été lâché définitivement par la DGSE et abattu avec la complicité de la CIA lors d’un affrontement à la frontière russo-ukrainienne comme l’affirme le Figaro ? Rocambole (Sara Giraudeau, ex-Phénomène) parti pour être “confinée” en Sologne n’y croit pas, les agents sur le terrain se retrouvent fragilisés par la publication de cette “information” et JJA (Mathieu Amalric), pas au meilleur de sa forme, enquête sur ses propres collègues pour chercher une éventuelle taupe. On découvre Marie-Jeanne (Florence Loiret-Caille) sur le terrain en Egypte et on fait connaissance avec Mille Sabords (Louis Garrel) qui navigue entre Yémen, Jordanie et Arabie Saoudite… Comme toujours la série de Canal+ joue habilement avec les temporalités et les vérités à dimensions multiples des services d’espionnage et s’immerge avec méthode dans les problématiques géopolitiques de l’époque. Caméra vive, montage précis, sens du détail et maîtrise absolue de l’art du dépaysement anti-touristique, les deux premiers épisodes donnent le ton de cette dernière saison réalisée et “show runnée” par Eric Rochant qui l’a créée dans la veine directe de son meilleur film Les Patriotes. Il va falloir réapprendre la patience puisque les épisodes de cette cinquième saison de la meilleure série française semblent parti pour la jouer crescendo (comme sur la saison 4) et ne seront livrés que deux par deux chaque lundi, la crise du coronavirus ayant retardé la post-production. Un peu de temps donc avant de découvrir les deux deniers épisodes réalisés par Jacques Audiard, possible successeur de Rochant aux manettes d’une saison 6.
Nos vies formidables de Fabienne Godet, sur OCS
Après avoir exploré la dureté du monde du travail dans Sauf le respect que je vous dois, suivi le parcours de Michel Vaujour dans le documentaire Ne me libérez pas je m’en charge et dirigé Benoît Poelvoorde dans Une Place sur terre, Fabienne Godet a réalisé Nos vies formidables sorti en salles au printemps 2019. En racontant, au jour le jour, la cure post-désintox de Margot (Julie Moulier, immense actrice bien trop rare), Fabienne Godet parvient à éviter tous les poncifs du « sujet de société » et réalise son meilleur film. Véritable plongée dans un groupe de soutien isolé à la campagne, Nos vies formidables décrit une rehab avec ses hauts, ses bas, ses moments de doute, de souffrance, de révolte sans jamais s’appesantir mais en se concentrant sur l’humain. Documenté sans être documentaire, le film sonde l’âme humaine avec humilité et adopte toujours la bonne distance pour mettre en évidence la force du collectif dans la réparation des drames individuels. Pas de bien, pas de mal, pas d’esbroufe ou de superficialité mais une sincérité et une honnêteté à toute épreuve.
Vivre et chanter de Johnny Ma, en VOD
Très joli film chinois, coproduit par la France et présenté en mai dernier à la Quinzaine des réalisateurs, Vivre et chanter ouvre les portes de tout un pan de la culture traditionnelle chinoise de l’opéra qui, loin des fastes et des dorures que peut évoquer le genre dans les pays occidentaux, est ici un art populaire qui joue sur la proximité avec les populations environnantes. Le film est riche en représentation des diverses formes que recouvre cet art ancestral : du chant bien sûr et des costumes et masques rutilants et des histoires d’amours impossibles, mais également des cascades, des combats au sabre réglés au millimètre et des échappées dans le monde du burlesque. A noter que le réalisateur Johnny Ma, qui vit au Canada et a déjà réalisé Old Stone en 2016, s’est infiltré dans une réelle troupe d’opéra et que chacun des comédiens joue peu ou prou son propre rôle. Bien sûr, le destin de ce petit théâtre local et fauché, fait écho à celui de ses banlieues ravagées par les travaux des villes, ses petites agglomérations vétustes et villages abandonnés qui vivent des bouleversements souvent arbitraires dû à la volonté farouche d’un état peu enclins aux négociations, de se moderniser le plus rapidement possible. Le film, délicat et inclusif quant aux traditions artistiques millénaires et populaires qui sont sa toile de fond, évoque avec délicatesse un monde perdu dont les derniers vestiges font office de résistance. Le combat de ce petit théâtre et de ceux qui le peuplent n’est ni plus ni moins que celui de la tradition contre la modernité, et porte, en creux, celui des petits contre l’arbitraire. Si on y chante pour défier le destin, c’est surtout de vivre dont il est question et, en cela, le propos de ce film, habillé de tendresse, d’envolées oniriques et spectaculaires et d’une faculté à voir avant tout et partout la beauté du monde, est éminemment politique.