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Cinéma du réel : le meilleur du documentaire à Paris jusqu’au 24 mars

par | 17 Mar 2019 | CINEMA

Pour sa 41ème édition, le festival parisien dédié au documentaire sous toutes ses formes, “Cinéma du réel”, a ouvert ses écrans vendredi dernier au Centre Pompidou. Le Festival offre une compétition internationale de plus de 20 films inédits, une sélection française de 22 films et une programmation, Première Fenêtre, dédiée aux tout premiers pas de jeunes réalisatrices et réalisateurs sur le terrain passionnant du documentaire.

Le festival s’est ouvert avec le bouleversant M de Yolande Zauberman déjà récompensé du prix du jury au Festival de Locarno l’été dernier. En suivant Menahem, artiste qui revient sur les lieux de son enfance de jeune chanteur admiré et abusé par d’éminents religieux, dans la ville des ultra-orthodoxes de Bnei Brak, Yolande Zauberman signe un film puissant, qui se construit sur ses contradictions, qui plonge dans les tréfonds de l’âme humaine à la recherche de la vérité et du pardon. Le film est à découvrir en salles dès mercredi 20 mars.

Pour sa clôture, le 23 mars en soirée, le festival a eu le bon goût de programmer le déchirant documentaire de Frank Beauvais, Ne croyez surtout pas que je hurle qui ne sera visible en salles qu’à l’automne. L’occasion de découvrir l’un de nos coups de cour de la Berlinale en février dernier.

Ne croyez surtout pas que je hurle est un film saisissant, notre premier coup de foudre berlinois. Un journal intime construit par le montage d’extraits de films, très courts (quelques secondes, on imagine qu’il s’agit de respecter les règles du copyright ou du droit de citation) et percutants.

L’affiche de “Ne croyez surtout pas que je hurle” – Les Films du Bélier

Il y a d’abord la voix du réalisateur-narrateur qui dit beaucoup, se raconte. Et puis les images qui s succèdent au fil du récit. Elles semblent presque avoir leur vie autonome, elles ne collent que très rarement aux mots, faisant office de recul critique ironique quand nécessaire, de soulignement délicat parfois. Les mots et les images entretiennent une correspondance poétique, un vague cousinage qui, malgré l’enchaînement quasi frénétique des séquences, laisse de l’espace à chacun  pour se faire sa propre idée de la réalité évoquée. Ce récit de l’intime est simple et bouleversant. Le très beau texte en voix off dit, avec intelligence et sans fausse pudeur, les mois difficiles traversés à binge-watcher des films de tous ordres, du matin au soir (400 pour être précis, ceux-là même dont sont extraits les images qui ont servi au film, la boucle est bouclée) et surtout le pourquoi et le comment. Comment on se retrouve dans un bled paumé bien que familier (et familial, sa mère y vit) après un exil alsacien choisi à deux et mal vécu après la rupture, quand on se retrouve seul. Pourquoi on est malheureux, seul et accro aux films, pourquoi la dépression, les médocs et l’alcool, comment on (ne) vit (pas) sa vie d’homo dans un village isolé, passablement réac, et, qui plus est, sans le permis de conduire.

Sans la filmer mais en la documentant ainsi à coup d’images-pastilles, Frank Beauvais nous invite dans sa vie, nous laisse nous immiscer dans sa pensée analytique capable de se focaliser alternativement sur son état comme sur celui de la France et du monde. On pense à la puissance du Et Maintenant ? de Joaquim Pinto, c’est dire. On sourit beaucoup, on rit parfois, on est ému tout le temps. On sort anéanti. Anéanti mais joyeux parce que l’avenir s’éclaire, que demain n’a pas dit son dernier mot et qu’on a l’impression de s’être tout dit comme lors d’une première nuit bavarde avec un amant qui redonne de l’espoir quelque soit la suite de l’histoire.

Toutes les informations sur le festival : cinemadureel.org

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