C’est la révélation masculine de La Nuit venue, Guang Huo a quitté la Chine pour Paris il y a plus de 10 ans, il aime le cinéma de Wong Kar-wai et Jia Zhangke et joue du saxophone. Dans ce premier long métrage, il est Jin, DJ originaire de Pékin, exilé à Paris, manipulé par la mafia chinoise de la capitale qui l’exploite comme chauffeur VTC. Entretien avec le jeune premier à l’allure, dans le film, de Delon dans Le Samouraï.
Aviez-vous envie de faire du cinéma avant de tourner dans ce premier film ?
Guang Huo : C’était un rêve, mais je ne savais vraiment pas comment m’y prendre pour l’accomplir. Je me disais que c’était un métier difficile, qu’il y avait peu de place pour moi, en Chine surtout, d’où je viens. La compétition y est encore plus féroce. Je n’ai pas passé de casting en Chine, j’ai commencé à en faire lorsque je me suis installé à Paris, mais pas pour le cinéma. J’ai fait de la photo, un peu de mannequinat, de la publicité aussi, pour arrondir les fins de mois, mais je n’imaginais pas jouer un jour dans un film, surtout y tenir le premier rôle.
Comment avez-vous entendu parler de ce casting ?
Guang Huo : Par un ami photographe français. Il m’a transféré l’annonce du casting. Au départ, je n’étais pas très emballé. J’avais lu les premières lignes du synopsis : mafia chinoise à Paris, VTC, sans papiers … J’avais peur que cela soit très cliché. Puis, je travaillais à ce moment-là, et je ne savais pas comment m’organiser pour trouver du temps pour passer ce casting. Mais j’ai quand même réussi à m’arranger et j’y suis allé, parce que je suis tout de même d’une nature curieuse. J’ai rencontré Céline Chapdaniel, l’une des productrices, puis Frédéric Farrucci ensuite. Et c’est à leur contact, en discutant avec eux, que mes doutes sur le scénario et sur le traitement de l’histoire se sont effacés. J’ai eu confiance en leur regard comme ils ont eu confiance en moi pour interpréter le rôle de Jin. J’ai pris des cours de théâtre pendant quelques mois avant le tournage. On a répété avec Frédéric, pour le texte principalement. Des lectures, avec Camélia Jordana aussi (qui joue Naomi, NDLA), une fois qu’elle a été prise pour le film. Plus je travaillais le personnage de Jin, plus il me plaisait.
Vous avez commencé le tournage par une scène de concert (celui de Rone, qui fait la BO). Une scène romantique, avec le personnage de Camélia Jordana dans vos bras. Vous n’étiez pas impressionné ?
Guang Huo : Pas vraiment (rires) ! Je n’étais pas stressé du tout pendant cette scène-là parce que le courant passait déjà avec Camélia, nous nous étions habitués l’un à l’autre. Je n’avais pas beaucoup de texte pour cette séquence, et je me suis d’ailleurs dit que le reste du tournage allait bien se passer aux vus de cette première expérience. Mais c’est quand même devenu de plus en plus difficile : la concentration, la technique, faire ressentir les émotions par le regard. Frédéric m’a donné beaucoup de détails sur le personnage, il m’a raconté la vie de Jin avant qu’il arrive en France, lorsqu’il était DJ à Pékin. Mais il m’a laissé aussi beaucoup d’espace pour l’interprétation. Frédéric m’a conseillé de revoir Chungking Express de Wong Kar-wai, parce que le héros dans le film, même sans parler, s’exprime avec les yeux, et c’était l’enjeu ici aussi, arriver à transmettre des émotions par ce biais-là. Jin est un personnage de fiction, mais il a le caractère des jeunes chinois d’aujourd’hui, discret, moins expansif que les français. C’est une autre culture, une autre manière de figurer les émotions, on exprime parfois seulement la moitié de ce que l’on ressent, l’autre moitié est intériorisée. Frédéric a réussi à comprendre ça, ça m’a beaucoup surpris qu’il ait réussi à le saisir.
Avez-vous envie de continuer à faire du cinéma désormais ?
Guang Huo : Je ne sais pas, cela va dépendre des rôles, des films, des réalisateurs… Après le tournage de La Nuit venue, j’ai été approché par un agent, donc j’espère que ça va porter ses fruits. Mais pour l’instant, je reste sur mes gardes. J’aime le cinéma français, j’ai par exemple beaucoup aimé les films de Cédric Klapisch avec Romain Duris, L’auberge espagnole, Les poupées russes… Donc j’aimerais bien continuer à jouer, pas forcément dans des films noirs, tous les genres peuvent m’intéresser.
La Nuit venue, réalisé par Frédéric Farrucci, en salles le 15 juillet 2020, avec Guang Huo et Camélia Jordana. FRANCE.