La tête haute
C’est au sens propre comme au figuré qu’il faut comprendre le titre du film : la terre des hommes, c’est à la fois celle que l’espèce humaine cultive, mais aussi la terre sur laquelle les hommes règnent encore en maîtres. Fille d’agriculteur, Constance, qui essaie de sauver l’exploitation familiale de la faillite, l’apprend à ses dépends. Le mépris et le machisme des grands exploitants, elle y est confrontée quotidiennement, et au marché aux bestiaux, c’est elle qu’on regarde comme une bête curieuse. Alors quand l’influent et charismatique Sylvain (Jalil Lespert) lui tend la main, Constance retrouve un peu d’espoir, de foi en l’homme. Mais sa confiance va vite être abusée, comme son corps et son esprit. Naël Marandin fait le portrait d’une jeune femme qui se débat et se défend. Il raconte le pénible chemin qu’elle fait jusqu’à la délivrance, comme c’était le cas dans Slalom de Charlène Favier, sorti en mai dernier. L’ancrage social du film apporte une dimension supplémentaire au combat de Constance et sa dynamique universelle (#MeToo). C’est Diane Rouxel qui endosse ce rôle difficile, et elle est remarquable comme toujours. Le feu dans les yeux de Constance nous ravage, et sa détermination est partout, dans son travail, dans son couple (Finnegan Oldfield joue son jeune époux). Elle garde la tête froide et la tête haute. Naël Marandin évite écueils et pathos, faisant récit d’un choc et d’une révolte, que la justesse de la mise en scène soutient toujours et fait avancer vers la lumière – la photo est signée Noé Bach, talent décidément bluffant. C’est lorsque Constance sort du silence que le film change d’allure et l’histoire de braquet. Déroutant et important.
Réalisé par Naël Marandin. Avec Diane Rouxel, Jalil Lespert, Olivier Gourmet, Finnegan Oldfield… Durée : 1H36. En salles le 25 août 2021. Label Semaine de la Critique 2020.