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Le Balzac, paquebot du cinéma d’art et d’essai

par | 15 Août 2017 | CINEMA

Fort de son histoire qui s’écrit sur près d’un siècle, le Balzac entretient un rapport intime au cinéma et le revendique via sa programmation pointue comme son cadre surprenant. A deux pas de la plus touristique des avenues du monde, ce lieu pensé pour le spectateur invite au dépaysement et à l’aventure.

Paquebot du cinéma 

Le Balzac déploie un décor élégant et sophistiqué, digne d’un décor de cinéma. Pour débuter cette traversée, il faut descendre quelques marches et s’aventurer dans un léger sous-sol dont les parois imitent celles d’une coque de bateau. Hublot, murs en métal capitonnés, éclairage tamisé, faux tableau de bord… Tous les éléments sont présents pour embarquer à bord du vaisseau et ses horizons “art et essai”. Le Balzac tient à donner la chance aux films d’auteurs les moins commerciaux tout en s’accordant une vaste liberté de programmation. Avec plus d’une trentaine de films projetés par an, le cinéma valse entre sorties nationales, rétrospectives – la dernière en date étant dédiée à Tarkovski – et retransmissions d’opéra et de théâtre. Passée la surprise du hall et des couloirs, on se retrouve happés par la beauté de la grande salle (la plus ancienne des trois) à la fois élégante et luxueuse, baignée de rouge, et coiffée d’un rideau rouge dissimulant la toile blanche.

Près des Champs, fluctuât nec mergitur 

A ce cinéma, l’adage parisien n’aura jamais aussi bien collé. Implanté depuis 1935 dans une petite ruelle qui jouxte la plus belle avenue du monde, le Balzac résiste aux flots tumultueux de l’industrialisation du 7e art et demeure l’un des rares cinéma de quartier aux abords des Champs Élysées. D’abord référent du grand cinéma hollywoodien d’avant guerre, il devient la salle d’exclusivité des films français pendant les trente glorieuses – c’est d’ailleurs lui qui mise sur des films tels que La Guerre des boutons, A bout de souffle ou Jour de fête. Avec l’arrivée de la firme UGC en 1971 qui rachète de nombreux cinémas indépendants, sa fréquentation prend du plomb dans l’aile. C’est dans les années 1970 que Jean-Jacques Schpoliansky, petit fils du fondateur, reprend l’embarcation suite à la mort de son grand père et décide d’en modifier la trajectoire. Objectif : transformer l’ancien amiral des films français en cinéma d’art et d’essai. Les grands travaux de rénovation démarrent en 1993.

La programmation doit se démarquer des grosses salles qui ont pris le pouvoir sur les Champs. Tel un capitaine reprenant la barre, fort de son éternel bonne humeur et de son stakhanovisme, Jean-Jacques Schpoliansky remet le navire à flot, doucement mais surement, grâce à un travail de longue haleine effectué auprès des spectateurs qu’il rencontre en présentant les séances. Encore aujourd’hui, il s’applique à animer certaines projections afin de donner une vie à ce cinéma qui, au-delà de ses salles, se caractérise par la convivialité de son hall d’accueil. Typique : le bar y est davantage visible que la caisse. « C’est un cinéma qui a une âme, affirme son directeur. On n’est pas un spectateur lambda quand on vient au Balzac, on vient pour participer à une aventure ». Une aventure conviviale que l’on se prépare à vivre autour d’un café que l’on peut consommer dans une petite salle appelée le foyer, conçue comme une cabine de bateau. A la fois chaleureux et isolé, le Balzac nous invite à nous déconnecter de la folie touristique qui grouille à deux pas de ce lieu, gardien vivant d’une certaine idée du cinéma, d’un précieux patrimoine à faire vivre plutôt qu’à conserver. D’ailleurs la présence du Balzac interpelle dans un endroit pareil, et donnerait presque l’impression de s’être échoué au cœur d’une terre qui ne lui était pas promise. Les loyers sont démentiels, et attirer de nouveaux spectateurs est un défi au quotidien. Mais Le Balzac tient bon la barre face aux écrasants bateaux de croisières sur les Champs (Gaumont, UGC…) . « En tous cas, on fait tout pour que ça ne soit pas le Titanic ! » nous glisse avec humour le directeur, Jean-Jacques Schpoliansky, personnage à découvrir autant que ce cinéma dont il tient le gouvernail depuis 44 ans.

Le Balzac – 1 rue Balzac, 75008 Paris – 01 45 61 10 60

Tarif : 10,50€

Cartes UGC illimité et Gaumont Le Pass acceptées

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