L’envers du match
Un deal obscur dans une voiture la nuit, des enfants innocents jouant au ballon, une fête d’anniversaire troublée à la manière du Parrain, voilà comment Camille Perton introduit son premier long métrage, Les Arènes. Elle y présente d’emblée son principal protagoniste, Brahim, jeune footballeur de 18 ans, s’illustrant comme attaquant au centre de formation de l’Olympique Lyonnais. Alors que ce dernier chapeauté par son cousin et agent, Medhi (Sofian Khammes, impeccable) s’apprête à signer un contrat professionnel dans son club, l’arrivée d’un homme mystérieux voire dangereux (le charismatique acteur vénézuélien Edgar Ramirez), sorte d’agent, va troubler le chemin tout tracé de Brahim. Aussitôt, la cinéaste évacue le sport et le terrain vert pour filmer les hommes en coulisses de ce grand théâtre footballistique et les transactions obscures de trading, soit l’achat et la revente des jeunes joueurs talentueux comme des marchandises très couteuses. À travers cette « société du spectacle », comme miroir du monde capitaliste, Les Arènes dissèque intelligemment, ce qui est caché dans l’ombre, les rapports de pouvoir et de désir, renforcé ici par l’homosexualité de l’agent offrant un regard homo-érotique singulier. Et Iliès Khadri qui fut un temps militaire avant de devenir comédien est le parfait choix de cette feuille de match pour incarner ce jeune homme droit et gentil, prétendant à une ascension sociale, qui va devoir imposer sa voix et ses envies pour exister en tant qu’individu dans cette logique mercantile où tout à un prix. C’est à cet endroit que la réalisatrice surprend, lorgnant vers le film noir, inspirée par les films de mafia américains. Elle injecte à sa mise en scène la tension poisseuse et vertigineuse de cet univers masculin, lui aussi en perdition.
Écrit et réalisé par Camille Perton. Avec Iliès Kadri, Sofian Khammes, Edgar Ramirez… 1h34 – The Jokers – En salles le 7 mai 2025.