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Magma de Cyprien Vial

par | 19 Mar 2025 | CINEMA, z - 2eme carre droite

Science fiction

Et si la Soufrière, le volcan guadeloupéen, se réveillait ? C’est la fiction que propose le réalisateur Cyprien Vial pour son troisième long métrage après Bébé tigre (2014) et Embrasse-moi (2017).  Quand, en 1976, les habitants de Basse-Terre ont été évacués par milliers pendant plus de six mois alors que cette même Soufrière menaçait d’entrer soudainement en irruption. Werner Herzog s’était rendu sur place pour y capter dans un film éponyme, La Soufrière, la menace du volcan et la parole de celles et ceux qui préféraient désobéir aux décisions politiques à leurs risques et périls. Pour Magma, Cyprien Vial pose sa caméra sur ce même territoire géographique et scientifique ancré dans le réel pour s’aventurer vers un imaginaire cinématographique. On suit un étonnant duo, la directrice de l’Observatoire Vulcanologue de Guadeloupe, Katia Reiter (qui porte le prénom de Katia Krafft – immense vulcanologue disparue avec son mari Maurice Krafft et auquel le cinéma a rendu hommage par deux fois dans Fire of love de Sara Dosa et Au cœur des volcans : Requiem pour Katia et Maurice Krafft de Werner Herzog, encore lui) interprétée par Marina Foïs (toujours excellente dans les rôles de spécialistes, s’effaçant dans l’incarnation de son personnage) et Aimé, un thésard guadeloupéen qu’incarne le décidément  très doué Théo Christine (Suprêmes, Vivre, mourir, renaître…). Alors que le film imagine une nouvelle fois la possibilité d’une irruption sur fond d’insaisissable nature et de tension inconfortable permanente, les scientifiques se voient confrontés aux décisions politiques de la préfecture dont le représentant est incarné par Mathieu Demy et à la population locale (tous locaux et acteurs non professionnels) en colère. Dans cette ambiance brumeuse et à travers ce duo, celle originaire de métropole qui fait figure d’autorité façon « white savior » et le jeune guadeloupéen en apprentissage, Magma témoigne des séquelles du colonialisme ultramarin encore bien vives, de la quête perpétuelle de la vérité par les habitants et de la peur de la reproduction d’un désastre social comme celui 1976. On pense inévitablement à la gestion catastrophique des pouvoirs politiques à Mayotte après le passage du cyclone il y a trois mois mais Vial est un optimiste et offre à ses personnages une double émancipation dans un vrai souffle romanesque porté par la musique de Léonie Pernet.

Écrit par Cyprien Vial et Nicolas Pleskof. Réalisé par Cyprien Vial. Avec Marina Foïs, Théo Christine, Mathieu Demy… 1h25 – Pyramide Films – En salle le 19 mars 2025.

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