La débandade
Si la génération X s’est retrouvée dans les errements de Xavier/Romain Duris dans la trilogie de Cédric Klapisch, la génération Y a elle aussi son anti-héros, à la seule différence qu’il traverse plusieurs univers, qu’il a été façonné par plusieurs auteurs. Depuis ses premiers pas en ado benêt et ricanant dans Les Beaux gosses de Riad Satouff, Vincent Lacoste ne cesse de surprendre tout en étant le même et s’est imposé comme l’acteur-étendard d’une génération. En 10 ans et un peu plus de 20 films, il a été ado insupportable (souvent), étudiant en médecine chez Thomas Lilti, jeune lover atypique (Victoria de Justine Triet), gay provincial-alter ego chez Honoré et a même incarné la souffrance du Parisien post-novembre 2015 dans le très beau Amanda de Michael Hers. A chaque fois, sa nature se teinte de touches nouvelles, de délicates variations, sans jamais se départir d’un humour particulier, d’une dérision ironique qui parvient à ne jamais verser dans un cynisme facile. A 26 ans, il est devenu un marqueur d’époque, incarnant les hauts, les bas des vingtenaires des années 2010, aujourd’hui pré-trentenaires.
C’est le cas dans Mes Jours de gloire qui, malgré son titre fanfaronnant, n’est autre qu’un film sur la dépression chez les jeunes adultes. Pour son premier long métrage, Antoine de Bary reprend quelques-uns des motifs qui avaient fait le succès de son court métrage L’Enfance d’un chef. Dans les deux cas, Lacoste (ici Adrien) incarne un comédien aux allures de loser qui se voit confier le rôle du jeune De Gaule par un réalisateur allemand au caractère particulier. Mais rien ne va plus dans la vie d’Adrien, un chaos silencieux se met en place autour de lui : il est au bord de la faillite personnelle, ses parents font discrètement vie à part (formidables Emmanuelle Devos et Christophe Lambert), ses potes ont une proximité excluante et malgré sa rencontre avec une lycéenne pas farouche (Noée Abita qui a imposé avec Ava, Le Grand bain et Genèse, sa présence atypique), il ne bande plus.
Chronique désinvolte et sifflotante d’une dépression, Mes Jours de gloire se construit sur les non-dits et évite tous les pièges de la comédie efficace et à la mode. La descente comme la remontée sont à la fois douces et ardues et dessinent un petit parcours du combattant émotionnel dont Vincent Lacoste se fait, une fois de plus, l’interprète idéal.
Réalisé par Antoine de Bary. Avec Vincent Lacoste, Emmanuelle Devos, Noée Abita, Christophe Lambert, … – 1h39 – FRANCE – Sorti en salles le 26 février 2020 – Disponible en VOD le 4 juin 2020.