Sélectionner une page

Mission Pays Basque de Ludovic Bernard

par | 5 Juil 2017 | CINEMA

De la gentille comédie à la romance clichée …

Sibylle (Elodie Fontan), une jeune Parisienne travaillant dans la finance, tente de racheter à bas prix une quincaillerie au Pays Basque pour en faire un supermarché. À son arrivée, elle tombe sur Ramon (Florent Peyre), neveu du propriétaire, qui ne compte pas la laisser arnaquer son oncle. Il faut admettre que, dans un premier temps, la confrontation de ces deux mondes opposés prête à sourire. L’idée n’est pas particulièrement originale mais permet des situations divertissantes. Bienvenue chez les Ch’tis mettait en scène la rencontre du Sud et du Nord, Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? jouait sur les différences d’appartenances religieuses et ethniques et L’Ascension (précédent film de Ludovic Bernard) évoquait des différences sociales; mais si ce dernier se concentrait sur le voyage d’un jeune de banlieue, prêt à gravir l’Everest pour prouver son amour à une fille (romance au second plan) Mission Pays Basque, lui, déçoit dès lors qu’il penche du côté de la comédie romantique.

Le film enchaîne les facilités scénaristiques et les stéréotypes sans aucune volonté de crédibilité, dans l’unique but de maintenir son spectateur un brin éveillé. Ainsi, de longues minutes seront accordées au développement d’une sous-intrigue aberrante, où les deux protagonistes devront livrer un camion d’armes (et pas des petites, mitraillettes et bazookas) à un groupe révolutionnaire de la région. Passage durant lequel Sibylle se retrouvera face à face avec un ours, craquera sa culotte deux fois et finira couverte de boue, sans que tout cela n’ait vraiment d’importance pour la suite du récit. En parallèle, le film évoque de façon lointaine une autre romance plutôt charmante, elle, celle de Gaëtan (Damien Ferdel, plus vrai que nature en jeune beau-frère couillon de Sibylle), qui s’éprend de Mirentxu (Ilona Bachelier de la série Les Grands), une fille du pays. Avec tout ce que cela implique (obligation de se cacher d’un père qui ne veut voir sa fille qu’avec un Basque), cette histoire secondaire, qui parvient le mieux à tirer parti de la thématique de départ et à se caler sur les codes de la comédie romantique, aurait mérité d’être davantage mise en avant.

Mais le plus agaçant avec Mission Pays Basque, c’est peut-être le regard porté sur l’actrice principale. Néanmoins très sympathique, Elodie Fontan se voit un peu trop souvent ramenée à sa belle plastique. Et ce, dès le dossier de presse, qui écrit, via une question posée au réalisateur, « qu’au-delà de ses indéniables atouts physiques, Elodie Fontan prouve également ses qualités de comédienne ». Encore heureux ! Une tournure de phrase étonnante, d’autant que l’actrice, au travers de ses derniers films majeurs (Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu et Alibi.com) n’a, a priori, pas de quoi être réduite à « la bombasse du film ». Bien que le réalisateur veuille en faire un personnage plutôt construit, il ne peut s’empêcher de la ramener, même inconsciemment, à son physique. D’une part en la déshabillant sans que cela soit réellement nécessaire – une attaque d’abeille et la voilà en soutien-gorge, au réveil en chemise/culotte, ou en pleine dégustation lascive d’une cerise -, d’autre part via les nombreuses allusions des hommes qui l’entourent. Mais surtout, Ludovic Bernard, dans une vision patriarcale maladroite, la réduit à un personnage cliché. Celui de la « jolie pépée », que seul un homme dans toute sa virilité sera capable de rendre vraiment heureuse, en la faisant abandonner son couple (compréhensible tant son petit ami s’avère antipathique) et son choix de carrière (plus discutable puisque rien n’indique un épanouissement de sa part à travailler dans une épicerie). Aurait-ce été si aberrant de le faire, lui, devenir soudain employé de bureau ? Voire qu’aucun des deux n’ait à se soumettre au mode de vie de l’autre ? À défaut d’être un bon film, Mission Pays Basque aurait pu au moins être surprenant. Raté.

Réalisé par Ludovic Bernard. Avec Élodie Fontan, Florent Peyre, Daniel Prévost … Durée : 1H40. En salles le 12 juillet 2017. FRANCE

Pin It on Pinterest

Share This