Les mots pour le jouir
Elles s’appellent Marie, Jessica, Melissa ou Laïss, elles ont la vingtaine et répondent, face caméra, aux questions que posent Daphné Leblond et Lisa Billuart-Monet, réalisatrices de ce documentaire aussi instructif que libérateur sur le plaisir féminin. Et en matière de plaisir, il est un organe dont les manuels d’éducation sexuelle parlent peu ou minimisent la taille et la fonction : le clitoris, près de 11 centimètres de long.
Des clichés persistants sur la sexualité, souvent véhiculés par la culture porno, en passant par la notion de consentement ou les souvenirs que laissent (ou pas) une première fois, Mon nom est clitoris n’avance jamais masqué. La parole est aux femmes, et qui de mieux qu’elles pour parler de ce qu’elles ressentent, physiquement, intimement. Des mots et des histoires qui longtemps ont été tus, pas vraiment par pudeur, mais plutôt parce que la société les a rendus inaudibles. L’une des protagonistes raconte qu’elle a pris conscience de sa sexualité par le truchement de celle des garçons, en comprenant qu’elle était un objet de désir, mais que son désir à elle n’était pas encore pas un sujet. Alors oui, entendre parler soudain de sexualité féminine avec autant de vérité, ça ressemble presque à une victoire de Coupe du Monde de foot (images à l’appui dans le documentaire). C’est bien d’égalité dont il est ici question, le documentaire ne marginalise personne, personne n’est pointé du doigt, et ce qu’il exprime, c’est l’idée que libération de la parole est la ligne de départ du combat.
Au delà de son aspect militant et de sa réalisation intime et personnelle, ce documentaire devrait être montré dans tous les collèges et lycées de France et d’ailleurs. Son caractère ludique et instructif le rend tout public, et la mission que se sont données les réalisatrices – celle de remplir les blancs que l’histoire a laissés – est brillamment accomplie. Des qualités qui n’ont pas échappé aux Magritte, puisque Mon nom est clitoris est reparti avec le prix du meilleur documentaire en 2020.
Documentaire réalisé par Daphné Leblond et Lisa Billuart-Monet. Durée : 1h20. En salles le 22 juin 2020. BELGIQUE.