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Playlist de Nine Antico

par | 29 Mai 2021 | CINEMA, z- 1er carré gauche

Play it again, Nine !

Nine Antico, dessinatrice et autrice de BD célébrées, trouve d’emblée la note juste avec Playlist, son premier long métrage. Portée par une Sara Forestier épatante, cette comédie atypique pourrait bien être le tube de l’été… Une chanson de Daniel Johnston, song-writer tourmenté, revient en boucle tout le long de Playlist, tel un refrain obsédant, un leitmotiv déchirant… ou une blague. Son titre : “True Love Will Find You In The End”. Elle n’a évidemment pas été choisie par hasard. En seulement quelques mots – « le véritable amour te trouvera à la fin » en français dans le texte – et quelques notes éraillées, tout est dit, tout est posé, ou presque. De fait, ce chant bricolé, mêlant tristesse, romantisme et dérision, ricoche idéalement avec le parcours à la fois chaotique et plein d’allant de Sophie, l’héroïne si attachante du premier film de Nine Antico. Une chanson au diapason, en quelque sorte. N’allez pas croire pour autant que Playlist ne s’adresse qu’aux trentenaires nostalgiques, amateurs de pop-songs délicates. Son récit bouillonnant, tour à tour rageur, sensuel et amusé, est bien plus large, plus gouailleur, plus polyphonique que ça. Bâti à partir d’un scénario original, il transcende les chapelles et les générations, et permet à son autrice-réalisatrice d’affirmer d’emblée un vrai tempérament de cinéaste… tout en restant fidèle à son univers originel. Celui que l’on a tant aimé découvrir à travers une série de BD girly et rock’n roll (Coney Island Baby, Girls Don’t Cry, Tonight).

Good vibrations

Raccord, en somme, et mieux que cela encore ! Certes Playlist nous raconte l’histoire d’une dessinatrice de 28 ans, aussi bien en quête amoureuse que professionnelle, satire savoureuse du petit monde de la BD à la clé. Et certes l’on y retrouve ce personnage de fille libre, qui fonce quoi qu’il arrive, avec pertes, fracas et fous rires, comme seule Nine Antico sait les concocter. Sauf que l’on est au cinéma, art non plus seulement du trait, du cadre et du découpage, mais aussi du mouvement et de l’incarnation. Deux nouveaux paramètres qui lui permettent de sortir de sa bulle pour mieux se réinventer. Piochant aussi bien du côté de Lena Dunham et de sa série Girls (pour ses héroïnes dessalées, foireuses, hilarantes) que de la Nouvelle Vague (pour sa voix off et ses images en noir et blanc) ou, plus étonnant, de Martin Scorsese (pour sa façon de filmer les corps en mouvement à coups de plans séquences hyper fluides), Nine Antico nous donne à voir un film beau et rythmé, étonnamment maîtrisé. Moderne et très personnel in fine. Le choix de Sara Forestier, dans le rôle de l’intrépide Sophie, participe sans doute de cette vibrante singularité : sauvage et affable, gracieuse et si peu coquette, la blonde actrice irradie de bout en bout, génialement accompagnée par Laetitia Dosch dans le rôle (secondaire) de sa meilleure amie. L’accord entre elles est parfait. C’est dire si leur réalisatrice, qui a su filmer l’harmonie dans le chaos, est une cheffe d’orchestre à suivre. Avec ou sans Daniel Johnston, play it again, Nine !

Playlist, de Nine Antico, avec Sara Forestier, Laetitia Dosch, Grégoire Colin, Pierre Lottin. Sortie en salle le 2 juin.

 

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