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Premiers plans 2025 : Palmarès et coups de coeur

par | 29 Jan 2025 | Reportage, z- 1er carré gauche

Parlez jeunesse !

Malgré un climat politique tendu après le vote de la coupe budgétaire du Conseil régional du Pays de la Loire concernant, entre autres, Premiers plans d’Angers, du 18 au 26 janvier le festival a fait rayonner les premiers films européens et le public était bien au rendez-vous dans les salles angevines ! Retour sur le palmarès du jury présidé par Nicole Garcia et nos coups de cœurs francophones de cette 37e édition guidée par les voix de la jeunesse.

Depuis plus de trente ans, Premiers plans poursuit sa mission principale, dénicher les cinéastes en devenir et révéler leurs premières œuvres. Ce dimanche 26 janvier, lors de la soirée de clôture de la 37e édition, le jury long-métrage présidé par l’actrice-réalisatrice Nicole Garcia, accompagnée de la comédienne Nadia Tereszkiewicz et des cinéastes Boris Lojkine et Anna Novion a récompensé du Grand Prix du Jury, Vers un pays inconnu du palestino-danois, Mahdi Fleifel, passé par la Quinzaine des cinéastes l’an dernier. Le film Kneecap de Rich Peppiat obtient lui une mention spéciale du jury. Côté interprétation, Joana Santos a remporté le Prix d’interprétation féminine pour On Falling de Laura Carreira alors que La Pampa d’Antoine Chevrollier a raflé trois prix dont celui de l’interprétation masculine couronnant le jeune Sayyid El Alami ainsi que le Prix du public et le Prix Scania de la diversité. Dans ce premier long du cinéaste français, sélectionné à la Semaine de la critique en mai 2024, l’acteur qui interprétait Malik Oussekine dans la série Oussekine (du même Antoine Chevrollier) avant de s’illustrer dans l’adaptation du Goncourt de Nicolas Mathieu, Leurs Enfants après eux des frères Boukherma, incarne Willy, un adolescent féru de motocross comme son meilleur ami d’enfance Jojo. Antoine Chevrollier dépeint à travers ces deux personnage ancrés dans un décor rural des questionnements autour de la virilité, des rêves enfouis, et une opposition à l’autorité des adultes. L’amitié se veut un rempart à la complexité d’un milieu social et de ses injonctions.

Justement, cette année à Premiers plans, la jeunesse n’était pas seulement derrière la caméra. Elle s’invitait comme principale protagoniste dans la majorité des histoires racontées. À travers ces différentes propositions programmées, le festival se faisait miroir d’une société où des personnages jeunes sont bien décidés à couper le cordon avec l’idée d’un vieux monde, voire à s’exiler dans l’espoir d’un ailleurs tout en s’insérant dans des univers particulièrement forts. C’est le cas de La Pampa dont la solidarité entre adolescents répond à celle qui se lie dans Little Jaffna de Lawrence Valin entre Michael, policier d’origine sri-lankaise infiltré dans le quartier parisien « Little Jaffna », et les jeunes orphelins criminels de cette communauté tamoule. Le déracinement, terreau de cette jeunesse obligée de compter uniquement sur elle-même, se retrouve dans quasi tous les films de cette compétition – des cousins exilés palestiniens cherchant à rejoindre l’Allemagne dans Vers un pays inconnu, à cette famille de vacanciers se retrouvant subitement réfugiés dans Under the Volcano de Damian Kocur. Dans Los Turtuga (littéralement « Les Exilées ») de Belén Funes, une mère et sa fille font face au deuil différemment dans une vie barcelonaise qui contraste avec les origines catalanes rurales de leur famille tandis que les sœurs fusionnelles de September & July sont obligées de partir au bord de la mer après un drame. L’actrice-réalisatrice Ariane Labed dévoile, avec ce premier long métrage, un univers marqué par le décalage et la liberté pour évoquer les troubles adolescents. Le deuxième long métrage romanesque de Maura Delpero Vermiglio ou La Mariée des montagnes situe en 1944 l’arrivée d’un jeune soldat italien trouvant refuge dans la famille nombreuse de l’instituteur du village, bousculant leurs habitudes. La cinéaste fait exister chaque enfant leur offrant une identité propre et ses jeunes comédiens excellent comme ceux qui incarnent le trio de jeunes rebelles irlandais qui trouve sa voix par le rap engagé dans Kneecap de Rich Peppiatt.

Donner de la voix et libérer le verbe, tout un programme ! Les courts métrages français en compétition ne font pas exception puisqu’ils mettent eux aussi la lumière sur des protagonistes enfants et adolescents qui prennent la parole et occupent l’espace. Que ce soit le duo de jeunes marseillais de La Vérité (multi-récompensé du Prix du public, Prix des Bibliothécaires, Prix des Jeunes Internationaux ainsi que du Prix d’interprétation féminine pour son actrice Oumnia Hanader) se redécouvrant dans une joute verbale parfois vulgaire, parfois poétique mais toujours bloquée dans les non-dits, les deux collégiens du bus de l’amitié, Erwan, malvoyant, et David, en fauteuil roulant, dans le film drôle de Pablo Léridon,  Les Petits Monstres (double prix d’interprétation masculine pour Samuel Kalambay et Oscar Bloess) ou encore la petite Lou dans le film éponyme sensoriel de Tara Maurel. Sa caméra épouse son point de vue quand celle-ci appréhende le nouvel amoureux de sa mère comme la découverte d’un corps masculin bouleversant l’équilibre du duo mère-fille. Couronné par le Grand prix du jury (composé d’Erwan Le DucGalatéa Bellugi et Lisa Diaz), L’Avance de Djiby Kebe met en scène un jeune étudiant en art afro-descendant vendant sa première toile intime à une collectionneuse, comme un pacte faustien. Sous influence de Bresson, le métrage signifie avec délicatesse la solitude d’un racisme intégré via des silences parlants.

Côté compétition Diagonale, on retrouve l’essai-documentaire Kouté Vwa de Maxime Jean-Baptiste, un de nos coups de cœur des dernières éditions du Festival de Locarno et du FIFIB en 2024, dans lequel le réalisateur plonge, avec intelligence et en filmant ses proches, dans le parcours de Lucas, décédé une dizaine d’années auparavant en Guyane. Parmi les séances spéciales, le documentaire Lutte de jeunesse de Thierry de Peretti (2017) dont les rushs sont issus du casting d’Une Vie violente, le deuxième long métrage du cinéaste, faisait l’objet d’une projection. Ces interviews menées par la directrice de casting Julie Allione sont autant de témoignages de jeunes hommes corses face à la complexité de leur rapport à leur île et au nationalisme et forment le portrait d’une génération aux identités paradoxales. Dans un double programme rendant hommage au prix Jean-Vigo était montrés le film culte de ce dernier Zéro de conduite (1933), ode à l’irrévérence contre l’autorité établie dans un pensionnat de garçons et L’âge atomique, le premier long métrage d’Héléna Koltz sorti en 2012 et lauréat de ce prix. Dans une forme très libre, filmée à l’appareil photo, la réalisatrice de Vénus d’argent décrivait l’errance nocturne de deux adolescents atemporels, héros romantiques dans une boîte parisienne, qui, au fil de la nuit vont s’interroger sur leurs sentiments l’un pour l’autre.

Enfin, les ateliers Jeanne Moreau fêtaient leurs vingt ans et le festival présentait une sélection de premiers longs métrages qui s’y sont développés. L’occasion de revoir : Léa Seydoux en adolescente frondeuse dans Belle épine de Rebecca Zlotowski (2010), Kacey Mottet Klein et Galatéa Bellugi (trop) jeunes parents dans Keeper de Guillaume Senez (2015), le combat du Petit Paysan incarné par Swann Arlaud chez Hubert Charuel  (2017), le rêve de danseuse étoile de Lara, jeune fille trans, dans Girl de Lukas Dhont (2018) ou encore la petite Salomé face au deuil de sa grand-mère au cœur des montagnes portugaises dans Alma Viva de Cristèle Alves Meira. Et même les avant-premières choisies exprimaient les désirs lucides de jeunes gens parmi lesquels les lycéens internes d’aujourd’hui face à la fin d’une époque dans Ce n’est qu’un au revoir de Guillaume Brac ou Nour dans La Mer au loin de Saïd Hamich, jeune marocain immigré à Marseille traversant les années 1990 avec ses espoirs et ses désillusions. Autant de tableaux représentant une jeunesse multiple et complexe, d’hier et d’aujourd’hui.

Palmarès complet : 

Longs métrages européens 

Grand Prix du Jury : Vers un pays inconnu de Mahdi Fleifel (Royaume-Uni, Grèce, Danemark)

Mention spéciale du jury : Kneecap de Rich Peppiat (Irlande, Royaume Uni)

Prix du public (Prix Jeanne Moreau) : La Pampa d’Antoine Chevrollier (France)

Prix Bouvet Ladubay  (Prix d’interprétation féminine) : Joana Santos dans On Falling de Laura Carreira (Royaume-Uni, Portugal)

Prix Bouvet Ladubay (Prix d’interprétation masculine) : Sayyid El Alami dans La Pampa d’Antoine Chevrollier (France)

Prix Scania de la diversité : La Pampa d’Antoine Chevrollier (France)

Prix des activités sociales de l’énergie : Los Tortugas de Belén Funes (Espagne, Chili)

Prix Diagonales 

Interceptés d’Oksana Karpovych (Ukraine, France, Canada)

Courts métrages européens et français

Grand Prix du Jury – Courts métrages européens : I Died In Irpin d’Anastasia Falileieva (République tchèque, Slovaquie, Ukraine)

Mention spéciale du jury : A Cappella de Marcin Kluczykowski (Pologne)

Prix du public – Courts métrages européens : Hurikán de Jan Saska (République tchèque, France, Slovaquie)

Grand Prix du Jury – Courts métrages français : L’Avance de Djibi Kebe (France)

Prix d’interprétation féminine – Courts métrages français : Oumnia Hanader dans La Vérité de Malou Lévêque (France)

Prix d’interprétation masculine – Courts métrages français : Samuel Kalambay et Oscar Bloess dans Les Petits Monstres de Pablo Léridon (France)

Prix du public – Courts métrages français : La Vérité de Malou Lévêque (France)

Prix des Bibliothécaires : La Vérité de Malou Lévêque (France)

Prix des Jeunes Internationaux : La Vérité de Malou Lévêque (France)

Films d’école 

Grand Prix du jury : Between The Lines de Niklas Pollman (Autriche)

Prix du public : Humanity de Tereza Kovandová (République tchèque)

Prix des étudiants d’Angers : Between The Lines de Niklas Pollman (Autriche)

Plans animés 

Prix du public : Les Belles cicatrices de Raphaël Jouzeau (France)

Prix Nef Animation : It’s just a whole de Bianca Scali (Allemagne)

Mention spéciale Nef Animation : Entre les jours de Martin Bonnin (France)

Prix L’extra court : Entre les jours de Martin Bonnin (France)

Lectures de scénarios

Prix du public pour un scénario de long métrage : Hôtel saga de Clara Lemaire Anspach 

Prix Fondation Vision pour un scénario de long métrage : Corps étranger de Zoé Cauwet

Prix du public pour un scénario de court métrage : Le Printemps des miens de Murat Kilinc

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