Origin story
Freddie a 25 ans, elle est française et les traits de son visage sont “typiquement coréens” – ce sont ses camarades de Séoul qui le lui disent. Adoptée à sa naissance, elle n’était jusqu’alors jamais revenue en Corée. C’est un concours de circonstances qui l’y ont faite atterrir pour les vacances. Des vacances qui vont progressivement se transformer en aventure, avec son lot de hasards, de coïncidences et de retrouvailles tourmentées et bouleversantes. C’est le portrait d’une jeune femme déracinée que brosse le réalisateur franco-cambodgien Davy Chou dans Retour à Séoul : une jeune femme qui se cherche en même temps qu’elle découvre un pays, une culture, une langue, et son dossier d’adoption avec l’identité de ses géniteurs. La caméra la suit dans son voyage au bout des nuits coréennes, où elle danse dans les bars et les clubs, ivre de soju, de rage et de mélancolie. L’épopée est belle, elle est pop, elle court sur plusieurs années durant lesquelles Freddie, qui a le cuir épais, va essayer de dompter ses pulsions destructrices et de se réconcilier avec son passé. Le documentaire de Davy Chou, Golden Slumbers, faisait ressurgir les fantômes du passé, son premier film de fiction, Diamond Island, racontait l’attrait de la jeunesse pour le présent. Dans Retour à Séoul, le passé se retrace sans flash-back et le temps présent se consume vite, parce que Freddie n’ose pas trop s’y attacher. Davy Chou dessine une ligne de fuite claire, avant de marquer des temps dans la course de son infatigable héroïne. Inoubliable aussi – des personnages de cette nature (si bien trempée), on ne les croise pas tous les jours au cinéma. On ne découvre pas non plus tous les jours des actrices aussi magnétiques que Ji-Min Park, qui interprète Freddie. Une étoile est née. Quant au talent de Davy Chou, il se déploie à chaque minute du film – une puissance graphique et chromatique indiscutable, des plans-séquences vibrants, une vitalité constante. Récit d’apprentissage, film enquête, Retour à Séoul mélange avec brio les genres et les registres. Intense.
Réalisé par Davy Chou. Avec Ji-Min Park, Guka Han, Louis-Do de Lencquesaing … Durée : 1H59. En salles le 25 janvier 2023.