L’île de la réconciliation
Rarement, François Damiens aura été aussi émouvant que dans Sous le vent des marquises, le nouveau film de Pierre Godeau après Juliette, Éperdument et l’adaptation de la bande-dessinée Raoul Taburin. Le comédien se révèle en ouverture dans une séquence en noir et blanc, un postiche sur la tête et une prothèse dentaire, sous les traits de Jacques Brel. Mais il est en réalité Alain un célèbre acteur qui joue dans un biopic sur les dernières années de ce chanteur qu’il adule. Atteint d’un cancer du colon, il va s’identifier au personnage Brel, qui épuisé quitta la scène et les projecteurs pour les îles Marquises. En plein tournage d’une scène au volant d’une voiture, Alain abandonne le tournage pour rejoindre une île bretonne où vit sa fille de 20 ans et son ex. Il espère des retrouvailles chaleureuses mais doit faire face à l’accueil glacial de Lou (Salomé Dewaels) qu’il a négligé pour vivre sa carrière en Belgique. Comme dans ses précédents films, le cinéaste pose un regard tendre sur ce duo touchant de fêlures et de maladresses. La lâcheté et l’égoïsme du père se confrontent aux frustrations de la fille qui souhaite suivre ses traces en devenant comédienne. Le scénario du filmc sur Brel que la jeune fille va lire pour comprendre devient le lien d’une réconciliation familiale possible. À travers cette mise en abime, Pierre Godeau filme le pouvoir de l’imagination et évoque le film qui aurait du se faire. Peut-on réellement être père quand on fait du cinéma ? Sous le vent des marquises pose la question du sacrifice tout en utilisant la force de création du cinéma pour réparer un lien rompu. L’Île-aux-Moines et les Marquises ne sont dès lors plus qu’une seule et même île, lieu de résilience pour un duo père-fille auquel profite une belle osmose entre le deux comédiens.
Réalisé et écrit par Pierre Godeau. Avec François Damiens, Salomé Dewaels, Roman Kolinka… Durée : 1h31 – Pan Distribution – En salles le 31 janvier 2024.