Chronique d’une mort annoncée
Elle est vivante, plus que jamais. Il est mourant et impatient de partir. En adaptant le roman autobiographique d’Emmanuèle Bernheim, François Ozon prouve une fois de plus qu’il est un garçon plein de ressources. Il s’est attaqué, en trois ans, au film choral tiré de faits réels (Grâce à Dieu), au teen-movie adapté d’une lecture d’adolescent (Été 85) et, avec Tout s’est bien passé, à la chronique familiale. Il faut lui reconnaître un talent rare pour explorer et renouveler le récit en le travaillant comme une matière vivante. Ici, comme pour les deux films précédents, la mise en scène est sobre et comme dévouée à son propos tandis qu’Ozon instille l’inattendu. Son film sur les abus d’un prêtre lyonnais sur de jeunes hommes devenait une ode à la force du groupe dans la réparation des traumas, son “coming of age” gay et estival était hanté par la mort, et ce dernier opus multiplie les clins d’œil à la comédie sans se laisser dévorer par son sujet (l’euthanasie) ou par son contexte assumé avec une légère ironie (le drame bourgeois). Mieux, il offre à un trio de comédiens de premier plan, leurs meilleurs rôles depuis très longtemps : Dussollier excelle en vieillard tantôt acariâtre, tantôt fripon, salement amoché par un AVC et qui se plaît à déstabiliser son entourage en jouant avec les convenances. Géraldine Pailhas compose avec délicatesse et sans emphase son personnage de femme discrète qui s’est fait une raison et vit dans l’ombre de sa sœur. Sophie Marceau, longtemps convoitée par le cinéaste, est solaire comme jamais en fille préférée. Tout le long de son cheminement intérieur, qui sert de fil directeur au film, elle est au bon endroit, peut-être plus qu’elle ne l’a jamais été jusqu’alors.
Réalisé par François Ozon. Avec Sophie Marceau, André Dussollier, Géraldine Pailhas, Charlotte Rampling, Eric Caravaca…1h52 – FRANCE – Diaphana distribution – En salles le 22 septembre