Ce n’est peut-être pas le film de l’année, mais Terrible jungle remplit sa mission : faire rire. Hugo Benamozig et David Caviglioli signent une comédie d’été sympathique qui lorgne à la fois sur la comédie de jungle (un genre en soi, de Veber à Peretjatko, avec ses marqueurs) et sur un esprit BD ligne claire façon Franquin. Ce qui fait le sel du film ? Le trio de comédiens bien sûr. Au centre, rien de moins que Catherine Deneuve, la plus grande star de cinéma français, toujours très à l’aise dans la comédie (Le Sauvage, Belle-maman, Potiche) et, à ses côtés, deux des comédiens les plus drôles de leur génération : Jonathan Cohen, ici gendarme romancier, qui livre une des performances hilarantes dont lui seul a le secret, et Vincent Dedienne, héros du film, qui donne à son personnage de « Tintin » anthropologue une douceur lunaire qui lui va bien. Nous avons rencontré celui dont c’est le premier « premier rôle » au cinéma pour parler du film (en salles le 29 juillet 2020), de ses partenaires et de sa passion pour les actrices…
Qu’est-ce qui vous a donné envie de tourner dans Terrible jungle?
Vincent Dedienne : D’abord le scénario, j’ai beaucoup ri à la lecture, et, juste après, la rencontre avec Hugo et David, parce que sont deux chics types, deux jeunes mecs très sympa qui ont un bon esprit et qui parlaient bien de ce qu’ils avaient envie de faire… Ça m’a plu et j’ai tout de suite eu envie d’embarquer avec eux. Enfin, deux mots : Catherine Deneuve !
La comédie de jungle en France, c’est presque un genre en soi …
Vincent Dedienne : Oui, je pense à La Chèvre, mais je n’ai pas vu beaucoup de comédies de ce genre-là, et je trouve qu’il y en a moins ces derniers temps au cinéma. Si je ne me trompe pas, dans ce type de comédies dont vous parlez, c’est souvent un duo qui est à l’écran.
Là, le duo existe à distance car le personnage de Jonathan Cohen et le vôtre ne se rencontrent que très peu…
Vincent Dedienne : Je n’ai vu le film qu’une fois pour l’instant, mais ce que je peux dire, c’est que Jonathan est ÉNORME. Je crois que c’est le garçon avec lequel j’ai le plus travaillé jusqu’à maintenant puisqu’on a tourné ensemble dans Premières vacances, comédie dont il est le héros. On ne se connaissait pas beaucoup, même si on s’était croisé sur des tournages du Burger Quiz ! Et après Terrible Jungle, il m’a embarqué dans sa série La Flamme qu’il signe, dans laquelle il joue, et qui sera diffusée à la rentrée. Que voulez-vous, je suis le premier de ses spectateurs, le premier de ses fans ! C’est le génie comique que l’on sait mais c’est aussi un type très intelligent, il pense son métier d’une manière que je n’avais encore jamais rencontrée et que je trouve très pertinente. Il est très attentif à ce qui se passe autour de lui, ce n’est pas du tout un monstre de comédie qui ne pense qu’à lui et qui fait chemin seul donc ça finit de le rendre, à mes yeux, complètement irrésistible !
Vous, dans le film, vous appuyez plutôt sur votre côté lunaire, plus premier degré…
Vincent Dedienne : De toute façon, le second degré ne fonctionne qu’avec un contrepoint qui est le premier degré. Dans le film, j’incarne ce premier degré, et la bascule se fait ailleurs. Et on ne peut pas maîtriser le second degré sans maitriser le premier, sinon ce n’est pas fait exprès et c’est gênant ! Mais ce rôle, ce n’est pas tant un contre-emploi que ça. Je ressemble pas mal à mon personnage, 50% sur Terre, 50% ailleurs !
Je ne sais pas pourquoi mais je trouve ça plus fou d’être actrice que d’être acteur !
L’une des raisons qui a pesé dans le choix de faire le film, c’est donc le fait de jouer le fils de Catherine Deneuve. Comment le travail avec elle s’est-il passé ?
Vincent Dedienne : Ah Catherine Deneuve ! Parlons-en ! Je pourrais en parler des heures. On s’était déjà croisé au Burger Quiz, décidément merci Alain Chabat ! Quand je suis allé la chercher à l’aéroport de La Réunion, puisque j’étais déjà sur place, je me suis dit que je n’aurais pas beaucoup d’occasions de me sentir comme Belmondo dans ma vie. J’en ai profité, j’ai fait mon Belmondo qui va chercher sa Sirène du Mississippi au débarcadère ! Et quand elle est arrivée, elle m’a dit qu’elle avait le trac d’arriver un mois après le reste de l’équipe, que tout le monde allait se connaître, j’ai eu l’impression de voir arriver une débutante. Elle a une vraie passion de ce métier, elle ne tient pas commerce, et elle est passionnée par beaucoup d’autres choses que le cinéma. Et ce qui est surréaliste et spectaculaire, c’est qu’il est extrêmement facile de travailler avec elle. En fait, c’est une actrice très intelligente, une cérébrale qui sait ne pas faire peser sa mythologie quand ça peut embarrasser tout le monde mais qu’elle sait s’en servir quand ça l’arrange ! Ça rend les choses faciles. Pour notre première scène je suis caché dans une malle et je me suis dit « donc là, je vais rentrer dans la malle, je vais entendre Action, et ce que je vais voir en premier c’est Catherine Deneuve » ! J’avoue que j’ai eu un mini-anévrisme. On a dîné un soir en tête-à-tête dans un petit restau de sushi de Saint-Denis et j’étais passionné face à elle.
On a l’impression que votre cinéphilie est très liée aux actrices ?
Vincent Dedienne : Ah mais complètement ce sont les actrices qui m’ont fait entrer dans le cinéma et cela continue. Je ne sais pas pourquoi mais je trouve ça plus fou d’être actrice que d’être acteur ! J’ai l’impression que c’est plus difficile que ça coûte plus et puis cela m’est plus étranger aussi, plus mystérieux. C’est presque de l’hétérosexualité du coup mon goût des actrices. C’est Azéma qui m’a fait rentrer dans l’œuvre de Resnais, plutôt que Dussolier ou Arditi.
Après avoir travaillé avec Deneuve, Baye et Frot, vous avez tourné L’Étreinte avec Emmanuelle Béart un film attendu pour 2021, que pouvez-vous nous dire de cette expérience-là ?
Vincent Dedienne : J’aimerais bien vous dire un truc moins midinette mais la première chose c’est que, comme les autres, c’est une chic fille, ce sont des personnes bien. Emmanuelle est passionnante, à elle seule, elle est un chapitre entier de l’histoire du cinéma, elle est l’incarnation de la féminité, un sujet autant qu’un objet de désir et de convoitise. Quand elle parle de son rapport à l’image, au théâtre, aux partenaires masculins et au désir, elle est vraiment passionnante ! Et on s’est connecté sur quelque chose d’un peu mystérieux, d’un peu intime, il faut savoir qu’elle est un peu poète…
Avec quelles autres actrices aimeriez-vous jouer ?
Vincent Dedienne : Il y en a beaucoup, mais j’aimerais beaucoup travailler avec Yolande Moreau ! J’adore le fait de ne pas comprendre comment les actrices font ce qu’elles font, il y a là pour moi un mystère, quelque chose qui m’attire et m’échappe. Ce sont des magiciennes. Et sinon, j’aime beaucoup Kristin Scott-Thomas aussi.